le Tabagisme passif des animaux de compagnie

Nathalie Oddos

Docteur en Pharmacie

Tabacologue

Publié le 08/02/2025

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Nathalie Oddos

Docteur en Pharmacie

Tabacologue

Publié le 26/03/2025

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Le tabagisme passif est un réel danger pour nos compagnons … 

En effet, en vivant quotidiennement aux côtés d’un maître fumeur voire deux maîtres fumeurs, chiens, chats mais aussi oiseaux, poissons, rongeurs partagent, outre son amour, la fumée de ses cigarettes. Les risques de cette exposition involontaire sont bien réels et plus importants qu’on ne l’imagine.

Rappelons que la fumée de cigarette se compose de nicotine accompagnée de plus 4000 autres composés dont 200 sont toxiques et 50 au moins sont cancérigènes. Elle se présente sous la forme d’un aérosol : un liquide dispersé en fines gouttelettes contenant des particules solides dans un mélange de gaz toxiques. Un cm3 de fumée contient environ 4 milliards de particules sphériques.

Comment nos compagnons se contaminent-ils ?

Les résidus de la fumée de cigarette sont dispersés dans l’air et se déposent partout dans notre environnement et, en particulier, sur le pelage des chiens et des chats. Lorsque ces derniers se toilettent, ils se lèchent et peuvent ainsi ingérer une quantité importante de nicotine et différentes particules toxiques, piégées dans leur fourrure. Chiens et chats peuvent également être contaminés au contact des vêtements du fumeur, tapis, revêtement du canapé.

En dehors de ce mode de contamination par contact, l’animal de compagnie inhale bien évidemment la fumée secondaire de son maître fumeur. Les animaux, ayant une fréquence respiratoire plus élevée que celle de l’homme, ingurgitent plus rapidement les gaz toxiques de la fumée. Du fait de leur petit gabarit, les oiseaux, les chiots, les chatons et les petits rongeurs y seraient encore plus sensibles 

Enfin, il existe un risque réel d’ingestion accidentelle de mégots de cigarette.

A quelles pathologies sont-ils sur-exposés ?

Le tabagisme passif peut entraîner, à court ou à long terme, de nombreuses pathologies inquiétantes chez les animaux et cela a été prouvé médicalement. Comme chez l’homme, l’exposition à la fumée du tabac augmente le risque d’allergie, favorise le développement de certains cancers et affecte le système immunitaire.

  • Dermatite allergique : un risque d’apparition multiplié par 4,4 chez un chien fortement exposé à la fumée de tabac et ce, d’autant plus, que la superficie du logement est petite ou l’appartement mal ventilé car la fumée se concentre d’avantage.
  • Troubles oculaires : les animaux de compagnie soumis au tabagisme passif semblent développer plus de conjonctivites et de blépharites.
  • Tendance plus élevée à la prise de poids
  • Affections ORL et pulmonaires : Suite à des expositions répétées et prolongées à la fumée de cigarette, la gorge, la trachée et les bronches du chien ou du chat sont le siège d’inflammations s’exprimant par une toux chronique, douloureuse et fatigante, par des crises d’asthme. Les poumons peuvent être atteints par une bronchite chronique et le fidèle compagnon peut alors développer une pneumonie favorisée, concomitamment, par la baisse de ses défenses immunitaires.
  • Cancers :
    • Cancer du poumon : La relation entre cancer du poumon et tabac est moins claire chez le chien que chez l’homme car la morphologie faciale jouerait un rôle important. Les chiens brachycéphales (à tête courte) comme les bouledogues présenteraient un risque plus élevé de cancer du poumon lié au tabac comparativement  à ceux à long nez comme les lévriers qui filtreraient de manière plus efficace les particules cancérigènes de la fumée.
    • Tumeurs des cavités nasales : Les chiens à long nez sont en revanche, significativement, plus atteints par les tumeurs de la cavité nasale dont le nombre est multiplié par 2,5 chez un chien soumis au tabagisme passif.
    • Lymphomes félins : Le chat passe beaucoup de temps à lécher son pelage dont les particules nocives qui se sont déposées sur sa fourrure, particulièrement celles de la fumée du tabac. Ce mode de contamination s’additionne à l’inhalation passive en multipliant par 2,4 le risque d’apparition d’un lymphome ou cancer des ganglions lymphatiques. Ce risque passe à 3,2 chez un chat vivant plus de 5 ans avec un propriétaire fumeur ou 3,3 avec un maître fumant plus d’un paquet par jour voire quadruplé si ses 2 maîtres fument.
    • Arthrose : Cette maladie fréquente chez le chat et le chien qui prennent de l’âge est favorisée et entretenue chez les animaux vivants auprès de fumeurs. En effet, comme chez l’homme, certains composés de la fumée de tabac, en augmentant le stress oxydatif, perturbe le renouvellement cellulaire (chondrocytes) du cartilage articulaire. De même, le monoxyde de carbone, connu pour ses répercussions sur le système cardio-vasculaire, altère l’oxygénation des cellules compromettant, en autres, la qualité du cartilage.
  • L’ingestion de mégots peut entraîner des troubles digestifs, des anomalies cardiaques voire un empoisonnement à la nicotine : la dose minimum de nicotine ingérée pouvant entraîner le décès d’un chien ou d’un chat, se situe entre 20 mg et 100 mg, soit l’équivalent de moins d’1 à 5 cigarettes (les mégots contiennent environ 25% du contenu total de nicotine de la cigarette). La faune sauvage (les oiseaux, les poissons, les mammifères marins) sont eux aussi victimes de la toxicité du tabac qui peut provoquer leur mort si la quantité de mégots ingérés est trop importante.

Les chats et les chiens ne sont pas les seules victimes du tabac …

Les oiseaux, sensibles à la qualité de l’air, risquent des « sinusites, pneumonies, allergies, cancer des poumons, problèmes oculaires, cardiaques, et de fertilité ». Pour les cobayes, une exposition de 6 mois favorise l’emphysème et l’hypertension pulmonaire. Les poissons d’ornement ne sont pas épargnés non plus étant donné que la nicotine est particulièrement soluble dans l’eau. Une exposition d’une heure dans une pièce enfumée suffit à augmenter la mortalité chez des guppies. L’eau de l’aquarium peut aussi être souillée lorsque le fumeur y plonge ses doigts imprégnés de tabac.


Afin de préserver l’espérance de vie de nos petits protégés, il est conseillé de les exposer le moins possible à la fumée de cigarette du fait de leur grande sensibilité. Il est évidemment préférable de fumer à l’extérieur ou à la fenêtre et d’aérer l’habitat. Il est recommandé de se laver les mains avant de les caresser ou de nettoyer l’aquarium. Comme on le ferait en présence d’un enfant, il faut vider régulièrement les cendriers en jetant les mégots dans une poubelle fermée et conserver, dans un endroit hors de portée de nos chiens et de nos chats, les cigarettes, cigares, patchs, gommes à mâcher de nicotine, cigarettes électroniques et leurs liquides…